La vérification de comptabilité

Dans le système fiscal français, l'impôt est assis, en règle générale, sur les bases d'imposition déclarées par les redevables dans leurs déclarations qui sont présumées exactes et de sincère.

Les insuffisances, inexactitudes ou omissions relevées dans ces déclarations sont présumées être commises de bonne foi.

Ces erreurs, qu'elles soient involontaires ou qu'elles révèlent par la suite une intention délibérée d'échapper à l'impôt, sont corrigées par l'administration, à qui il incombe de préserver les intérêts du Trésor tout en assurant l'égalité des citoyens devant l'impôt.

Ces corrections se font notamment par le biais, au niveau des entreprises, par des vérifications de comptabilité.

Qu’est-ce qu’une vérification de comptabilité ?

La vérification de comptabilité est un dispositif de contrôle fiscal contradictoire.

C’est un ensemble d'opérations qui a pour objet d'examiner dans les locaux du contribuable (sauf dans certains cas et après demande du contribuable) la comptabilité d'une entreprise individuelle ou d’une société, ayant une activité professionnelle commerciale, industrielle, libérale, artisanale ou agricole par exemple, et de la confronter à certaines données matérielles afin de contrôler les déclarations souscrites et rectifier éventuellement les erreurs, inexactitudes ou omissions (article L. 13 du livre des procédures fiscales).

La vérification de comptabilité ne doit pas être confondue avec l’examen de comptabilité, qui permet à l'administration fiscale de réaliser depuis le bureau des opérations de contrôle à partir du fichier des écritures comptables communiqué par l'entreprise, sans se déplacer dans les locaux de cette dernière (voir notre fiche pratique "Le Ficher des écritures comptables").

Qui peut être soumis à une vérification de comptabilité ?

Toutes les entreprises sont concernées par les procédures de vérification de comptabilité dès lors qu’ elles (i) sont soumises à une obligation de présentation de documents comptables et (ii) qu’elles relèvent de l'impôt sur les sociétés, de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices non commerciaux (BNC), des Bénéfices agricoles (BA) ou des taxes sur le chiffre d'affaires (TVA).

Comment se déroule la procédure de vérification de comptabilité ?

L’administration doit informer préalablement l'entreprise qu’un contrôle fiscal va avoir lieu

L'entreprise doit être informée en amont par l'envoi d'un avis de vérification (en recommandé avec avis de réception ou remis en main propre), précisant expressément que l'entrepreneur ou la société peut se faire assister par un conseil de son choix (formulaire 3927).

L'avis de vérification doit être accompagné de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié. Cet avis de vérification doit mentionner que le contribuable a la faculté de se faire assister d'un conseil au cours de la vérification et les années soumises à vérification.

Le vérificateur (contrôleur ou inspecteur des finances publiques) intervient dans l’entreprise

La procédure se déroule dans les locaux de l'entreprise sauf dans certains cas sur demande expresse du contribuable.

Lors de la première intervention, le vérificateur fixe le cadre et les modalités des opérations de contrôle. Cette première intervention permet notamment d'échanger par écrit ou par oral sur les caractéristiques de l'entreprise et sa situation économique et de rechercher en commun des modalités d'intervention appropriées.

Au cours du contrôle, le vérificateur associe l'entreprise de manière transparente à l'ensemble des opérations. En contrepartie, celle-ci doit mettre à sa disposition tous les documents nécessaires au contrôle (livres comptables, factures, relevés de comptes bancaires, contrats, par exemple).

Le contrôle peut porter cumulativement ou non et de manière sur l’analyse :

  • des principaux impôts commerciaux ;

  • des résultats de l’entreprise impôt sur les sociétés ou sur le revenu (catégories BIC-BNC-BA) ;

  • du chiffre d’affaires (TVA et taxes sur le chiffre d’affaires) ;

  • des actifs (CET et taxes foncières).

Durée du contrôle

Le vérificateur ne peut pas effectuer un contrôle sur place supérieur à 3 mois dans les petites entreprises (chiffre d'affaires est inférieur à 789 000 euros pour les activités d'achat/vente ou 238 000 euros pour les prestations de services). Néanmoins, en cas de graves irrégularités, le contrôle peut exceptionnellement durer 6 mois.

Pour les autres entreprises, aucune durée de contrôle sur place n’est prescrite par la réglementation. Les opérations de vérifications doivent s’étendre sur une déroulée raisonnable et peuvent durer 6 mois (référence indiquée dans la charte des droits et des garanties du contribuable vérifié) (article L. 52 du livre des procédures fiscales).

Au terme de cette intervention, l’inspecteur propose des rappels d’impôts formalisés par l’envoi d’une proposition de rectification

La procédure de vérification menée dans l’entreprise s’achève par l’envoi, en général par voie postale et en recommandé avec accusé de réception (elle peut être remise en main propre contre récépissé), d’une proposition de rectification (formulaire 3924 en général) (article L. 54 B du livre des procédures fiscales).

La proposition de rectification contient :

  • des renseignements préliminaires (impôts et périodes concernés, déclarations et actes en cause, le délai de réponse (voir ci-dessous), la possibilité pour le contribuable de se faire assister d’un conseil) ;

  • l’exposé des rectifications proposées :

    • la nature des rectifications (chef de redressements) ;

    • les motifs des rectifications (pour plus de détails sur ce point, vous pouvez prendre connaissance du BOFIP BOI-CF-IOR-10-40 no 80 et 190),

    • les informations recueillis auprès du contribuable. Sur ce point, l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales oblige l’administration fiscale à communiquer au contribuable rectifié les informations et documents dont l’administration a obtenu, dans le cadre de ses opérations de vérifications, communication de la part de tiers ;

    • le montant des rehaussements ;

  • la signature, la date, l’identification du service d'origine et de l'agent signataire.

L’envoi de cette proposition a pour conséquence :

  • d’interrompre le cours de la prescription applicable au droit de reprise de l'administration (exemple : en matière de TVA, l’administration fiscale peut vérifier l’année au cours de laquelle elle réalise les opérations de vérification (N) ainsi que les 3 années précédant l’année N (sauf cas particuliers). Afin d’être en mesure de procéder au rehaussement de l’année N-3, le service vérificateur devra envoyer une proposition de rectification avant le 31 décembre N). Cette interruption peut conduire le service vérificateur a communiqué une première proposition de rectification interruptive de prescription au cours des opérations afin de préserver ce droit de reprise. La conséquence de cette interruption est d’ouvrir un nouveau délai : le délai de mise en recouvrement de l’administration fiscale des redressements proposés. Ce délai est le même que le délai de reprise. Ainsi, en cas de contrôle fiscal achevé par l’envoi d’une proposition de rectification en année N, l’administration fiscale aura jusqu’au 31 décembre n+3 pour mettre en recouvrement les impôts rappelés ;

  • fixer les limites de l'imposition à établir à l'issue de la procédure ;

  • ouvrir un délai de réponse au contribuable de trente jours, prorogeable de trente jours sur simple demande du contribuable. Pendant le délai (de 30 ou 60 jours), le contribuable (ou une personne habilitée à répondre pour son compte, comme un avocat fiscaliste) peut soit accepter les rectifications, soit présenter des observations ( articles L. 57, R. 57-1 et R. 194-1 du livre des procédures fiscales).

Toutefois, à défaut de réponse dans le délai, le contribuable est réputé avoir accepté.

Délai de réponse du contribuable de 30 jours : comment calculer la délai ?

Le point de départ du délai correspond:

  • lorsque le pli a été retiré par l’entreprise, la date à retenir est celle du retrait effectif

  • si le pli n'a pas été retiré, la date à retenir est celle de la présentation à domicile.

    En cas de retrait au bureau de poste de la lettre recommandée par laquelle la proposition de rectification a été adressée au contribuable, le délai de réponse court à compter de la date de ce retrait. Le délai de réponse du contribuable court à compter de la date du retrait de la lettre recommandée au bureau de poste, même si la personne qui a retiré le pli l'a réexpédié à une autre adresse où il n'a été reçu qu'ultérieurement.

Computation du délai :

Le délai de trente jours, éventuellement prorogé, doit être considéré comme un délai franc.

Dès lors, pour son calcul, il doit être fait abstraction du jour du point de départ du délai et de celui de son échéance.

Ainsi une réponse à une proposition de rectification reçue par le contribuable le 2 avril qui serait adressée au service le 3 mai, soit le trente et unième jour suivant, doit être considérée comme recevable.

De plus, lorsque le dernier jour où le contribuable peut présenter sa réponse est un samedi, dimanche ou un jour férié, le délai est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

Que se passe-t-il en cas de retard ?

Une réponse parvenue après l'expiration du délai de trente jours, ou de soixante jours en cas de prorogation de délai, ne peut, en principe, être prise en considération.

Cela signifie qu’en cas de retard, le contribuable ne pourra pas présenter ses observations et sera réputé avoir accepté les redressements. Toutefois, cette acceptation tacite ne signifie pas pour autant que le contribuable ne pourra pas exercer des recours pour contester les rappels. Le contribuable conserve le droit de réclamer contre l'imposition après la mise en recouvrement du rôle ou la notification de l'avis de mise en recouvrement. Mais la charge de la preuve lui incombe.

Cependant, le service se montrera compréhensif à l'égard des contribuables qui justifieront avoir été, en raison d'un empêchement caractérisé, dans l'impossibilité de donner suite dans le délai imparti aux propositions de rectification qui leur ont été adressées. Il en sera ainsi, notamment, en cas de maladie ou à l'occasion des congés. En outre, le service devra éventuellement tenir compte des observations présentées tardivement si elles sont de nature, au regard d'une instance ultérieure, à mettre en cause le bien-fondé des impositions.

Comment présenter ses observations suite de l’envoi d’une proposition de rectification ?

Aucune condition de forme n'étant imposée par la loi, le contribuable peut présenter ses observations oralement ou par écrit. Dans l'éventualité d'une formulation orale, l'agent qui a reçu le contribuable annote immédiatement le dossier de l'intéressé des observations et de leur date.

En cas de formulation écrite, la réponse doit comporter la signature du contribuable ou d'une personne habilitée à répondre en son nom.

Les observations peuvent consister en un refus pur et simple ou comporter une argumentation à laquelle le service devra répondre.

Le fait de demander la saisine pour avis la commission départementale ou nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ou le comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche équivaut à une manifestation de désaccord de la part du contribuable.

Toutefois, une simple demande de renseignements à l’administration fiscale ne constitue pas des « observations ». Une telle demande n'interrompt pas le délai dont dispose l'entreprise pour présenter ses observations.

Et après ?

Lorsque des observations ont été présentées, l’administration est en principe tenu d’y répondre

Lorsque des observations ont été présentées par le contribuable, les propositions de l'administration sont modifiées dans la mesure où ces observations apparaissent valables.

Dans tous les cas où l'envoi d'une proposition de rectification a pour conséquence d'ouvrir le dialogue entre le contribuable et le service, il convient non seulement que le service vérificateur réponde au contribuable qui a formulé des observations, mais encore de motiver clairement comme ont dû l'être les rehaussements dans la proposition de rectification, les raisons qui justifient le rejet des observations présentées, que ce rejet soit total ou partiel.

L’administration fiscale dispose d’un délai de 30 ou 60 jours pour y répondre et l’absence de notification d’une réponse de l’administration dans le délai de 60 jours équivaut à une acceptation des observations du contribuable.

La réponse du contribuable ouvre des droits

Le contribuable qui a présenté des observations dans le délai légal peut, en principe, demander :

  • à rencontrer le supérieur hiérarchique du contrôleur ou de l’inspecteur des finances publiques ayant réalisé les opérations de vérifications (télécharger un modèle de recours ou consulter le BOFIP le détaillant les modalités de ce recours ) ;

  • l'intervention de la commission (commission départementale ou nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires (télécharger un modèle de courrier de saisine de la commission ou consulter les BOFIP BOI-CF-CMSS-20 ou BOI-CF-CMSS-30 détaillant les modalités des recours devant ces commissions) ou commission départementale de conciliation ) ou du comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche.

Aux termes de ces recours, l’administration fiscale doit émettre dans le délai de reprise un avis de mise en recouvrement.

Cet avis constate la créance de l’administration fiscale sur un contribuable, qui délimite l'étendue de l'obligation pécuniaire du redevable et qui permet au comptable public de poursuivre la personne qu'il désigne en recouvrement de l'impôt ainsi authentifié.

La notification de cet avis au redevable informe solennellement celui-ci de sa dette et lui ouvre un délai de recours pour la contester. Ce délai pour contester est de deux ans plus l’année en cours. Par exemple, un redevable recevant un avis de mise en recouvrement le 15 janvier 2020 dispose d’un délai qui court jusqu’au 31 décembre 2022 pour contester les redressements.

Cette contestation, avant d’être introduite devant le tribunal administratif, doit faire l’objet d’une réclamation préalable devant l’administration fiscale.

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