La facturation en matière de TVA

Si la déduction de la TVA repose sur des conditions de fond (réaliser des prestations de services ou des livraisons de biens ouvrant droit à déduction principalement), la déduction est également subordonnée, d’un point de vue formel, à la détention d’une facture en bonne et due forme remise par un fournisseur et mentionnant distinctement la TVA.

Parce que la facture est un document essentiel pour permettre aux assujettis de déduire la TVA, l’établissement et les modalités de conservation de ce document sont soumis à des règles particulières.

Réglementation applicable aux factures

Le principe est que les règles applicables aux factures sont celles du lieu d'imposition à la TVA de l'opération.

Toutefois, par dérogation à ce principe, la facture est soumise aux règles applicables dans l’Etat d’établissement de la personne rendant la prestation de services ou réalisant la vente de biens et pour lesquelles l'acquéreur ou le preneur assujetti est redevable de la taxe.

Cette règle dérogatoire ne s'applique pas lorsque l'assujetti a confié à son client un mandat de facturation.

En cas d'autofacturation, la facture émise par l'acquéreur ou le preneur (par ailleurs redevable de la taxe) doit se conformer à la réglementation applicable dans l'État membre dans lequel la livraison de biens ou la prestation de services est réputée être effectuée au regard des règles de territorialité.

Cette dérogation qui a pour objet de dispenser le fournisseur ou le prestataire de connaître les règles de facturation d'un État dans lequel il n'est pas établi se trouve privée de portée dans l'hypothèse où le preneur est chargé d'établir la facture aux conditions de l'État dans lequel il est établi.

 

Vous avez besoin d’un mandat de facturation ?

 

Bien que seule la TVA nous intéresse dans cette fiche pratique, nous rappelons que l’établissement des factures et leur conservation sont soumis à des règles relevant du droit commercial ou encore du droit de la consommation.

Opérations donnant lieu à facturation

Conformément aux dispositions combinées de l’article L. 441-3 du Code de commerce et de l’ article 289 du code général des impôts, tout professionnel exerçant une activité économique est tenu d’établir une facture, afin d’assurer une certaine transparence dans les relations interprofessionnelles, pour :

Délai d'émission des factures

La facture est, en principe, émise dès la réalisation de la livraison des biens ou de la prestation de services.

Elle peut, toutefois, être établie de manière périodique pour plusieurs livraisons de biens ou prestations de services distinctes réalisées entre l’émetteur de ladite facture et son client au titre du même mois civil. Dans ce cas, la facture doit être établie au plus tard à la fin de ce même mois.

La facture est établie en deux exemplaires, dont le premier doit être remis au client. Le second doit impérativement être conservé par le vendeur ou le prestataire de services

A destination de qui émettre une facture ?

Les livraisons de biens et les prestations de services qu'un assujetti réalise au profit d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie et qui ne sont pas exonérées en application de l'article 261 du CGI à l'article 261 E du code général des impôts, donnent obligatoirement lieu à facturation.

Les obligations relatives à l’établissement d’une facture sont restreintes lorsque le client du professionnel (vendeur ou prestataire) est un particulier (consommateur final) (BOI-TVA-DECLA-30-20-10).

En ce qui concerne la livraison de biens, l’établissement d’une facture est uniquement obligatoire lorsque le client (particulier) en formule la demande, pour les ventes à distance ainsi que pour les ventes intracommunautaires exonérées de TVA.

S’agissant ensuite des prestations de services, l’établissement d’une facture n’est pas imposée. Toutefois, le prestataire professionnel est tenu d’établir une note lorsque le prix de la prestation est égal ou supérieur à 15 euros, sauf si le client en fait la demande expresse.

Factures papiers, factures électroniques

Pour qu’une facture soit électronique, il faut que l’intégralité du processus de facturation soit électronique. Une facture électronique est une facture ou un flux de factures créé, transmise, reçue et archivée sous forme électronique, quelle qu'elle soit (BOI-TVA-DECLA-30-20-30-10).

A défaut, il ne s'agit plus d'une facture électronique mais d'une facture papier.

Une facture initialement conçue sur support papier puis numérisée, envoyée et reçue par courrier électronique ne constitue pas une facture électronique mais une facture papier.

Il existe une tolérance administrative permettant de considérer qu’une facture initialement conçue sur support papier puis numérisée, envoyée et reçue par courrier électronique soit une facture électronique. Cette facture « électronique » devra satisfaire à certaines conditions (sécurisée au moyen d’une signature électronique, conservation de la facture sous ses 2 formes, etc.).

Cette tolérance s’applique jusqu'au :

- 1er janvier 2019 : pour les petites et moyennes entreprises ;

- 1er janvier 2020 : pour les micro-entreprises.

La principale différence entre facture électronique et facture papier, en ce qui concerne les règles qui leurs sont applicables, réside dans les obligations en matière de conservation et de stockage (voir ci-après). En ce qui concerne le caractère probant, tant les factures électroniques que papiers peuvent être soumise à la piste d’audit fiable.

Une facture électronique ou papier, mais une facture probante

La directive 2010/45/UE dite la Directive Facturation poursuit comme objectif de traiter équitablement les factures papiers et le factures électroniques.

Cette réglementation a été transposée dans la réglementation française et plus généralement, toutes les autorités fiscales en Europe acceptent les factures électroniques dans les mêmes conditions que les factures papiers pour émettre ou recevoir des factures "probantes".

Une facture probante est une facture lisible (que l’on peut lire), authentique (possibilité de déterminer l’émetteur) et intègre (contenu non modifié / altéré pendant son envoi).

Ces trois critères sont posés par la réglementation et doivent être satisfaits pour justifier le droit à déduction de la TVA par une entreprise en cas de contrôle fiscal.

Pour satisfaire à ces 3 critères, la réglementation ouvre 3 voies :

L' EDI “fiscal” (BOI-TVA-DECLA-30-20-30-40): ce sont des factures émises et reçues sur la base d’échanges de données informatisées automatiques qui répondent à des critères spécifiés par la réglementation. Si ces critères ne sont pas satisfaits, il ne s’agit plus d’un EDI « fiscal » mais d’un EDI simple. Cette solution de facturation tombe alors dans la voie de droit commun.

La signature électronique qualifiée/sécurisée (BOI-TVA-DECLA-30-20-30-30): répondant aux critères posées par la réglementation. Si les critères de sécurité ou de qualification ne sont pas satisfaits, la facture signée électroniquement ne sera pas considérée par l’administration comme telle. Cette solution de facturation tombe alors dans la voie de droit commun.

La “voie de droit commun” (BOI-TVA-DECLA-30-20-30-20) applicable à toutes les autres solutions de facturation (papier et électronique - autre qu'EDI « fiscal » ou signature qualifiée/sécurisée) prévoit la mise en place par l'assujetti de contrôles de gestion/internes, établissant une piste d'audit fiable entre la facture et la livraison de bien ou la prestation de services.

C’est cette piste d’audit qui permet de satisfaire aux critères de lisibilité, d’authenticité et d’intégrité.

C’est cette piste d’audit fiable qui permet de justifier qu’une entreprise dispose de facture probante.La signature électronique qualifiée/sécurisée: répondant aux critères posées par la réglementation.

Si les critères de sécurité ou de qualification ne sont pas satisfaits, la facture signée électroniquement ne sera pas considérée par l’administration comme telle. Cette solution de facturation tombe alors dans la voie de droit commun.

Qu’est-ce la « piste d’audit fiable » en matière de facturation / TVA ?

La piste d’audit fiable est une documentation à constituer. Cette documentation doit décrire tous les contrôles internes, organisés et permanents de l’entreprise permettant de s’assurer de la réalité de l’opération facturée

  • la société doit être en mesure de reconstituer la chronologie de l’ensemble du processus et contrôles associés depuis l’origine de la facture jusqu’à sa conservation ;

  • l’identification et le niveau des contrôles relèvent de la seule responsabilité de la société ;

  • les contrôles doivent être adaptés à la taille de la société, la nature de son activité, la volumétrie des factures (émises et reçues) et les enjeux TVA ou montant des transactions.

La piste d’audit fiable impose aussi de démontrer l’existence de procédures visant à :

  • identifier et corriger les erreurs/anomalies dans la gestion des factures (double paiement, facture fictive) ;

  • assurer la bonne application des règles de facturation (mentions, format et conservation) ;

  • garantir le bon traitement TVA de la facture ;

  • limiter les risques de fraude TVA ;

  • protéger et sécuriser les données des systèmes d'informations ;

  • maintenir un paramétrage SI conforme aux règles TVA et au besoin de contrôle lié à la piste d’audit.

La piste d’audit fiable et sa documentation ne se résument pas à :

  • un chemin de révision comptable ;

  • un manuel utilisateur des outils de contrôle ou du système d'information ;

  • un suivi de contrôle interne selon un norme audit.

Les mentions sur factures

La liste des mentions figurant au code général des impôts et que nous reproduisons ci-après comportent des mentions obligatoires qui doivent apparaître sur toutes les factures, quelle que soit la nature de l’opération ou l’opérateur, et d’autres qui ne sont applicables qu’à certaines opérations ou certains opérateurs (article 242 nonies A de l’annexe II au code général des impôts et BOI-TVA-DECLA-30-20-20-10).

Mentions

Observations

Nom complet et adresse de l'assujetti réalisant l'opération

  • Nom et prénom pour l'enrepreneur individuel et éventuellement le nom commercial / Dénomination sociale de la société (suivie du numéro SIREN ou SIRET)

  • Numéro d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés pour un commerçant, suivi du nom de la ville où se trouve le greffe d'immatriculation / Numéro au Répertoire des métiers pour un artisan (n° Siren + RM + n° du département d'immatriculation)

Nom complet et adresse du client

  • Il s'agit du nom ou de la dénomination sociale du vendeur ou prestataire, l'adresse de son siège social ou de sa résidence habituelle

Le numéro individuel d'identification à la TVA attribué à l'assujetti

  • Lorsque l'assujetti réalise une opération imposable en France à partir du siège de son activité économique ou d'un établissement stable situé hors de France, la facture doit en principe être émise par ce siège ou cet établissement (adresse, numéro de RCS, etc..). Lorsque l'assujetti dispose par ailleurs d'un établissement stable en France qui participe à la réalisation de l'opération, la facture peut être émise par cet établissement, elle devra alors respecter les règles de facturation françaises.

Date d'émission de la facture

  • Date à laquelle elle est établie

Numéro de la facture

  • La numérotation doit être unique et basée sur une séquence chronologique continue, sans rupture.

Date de la vente ou de la prestation de service

  • Date de la livraison effective du bien ou de l'achèvement de la prestation de services pour chaque opération effectuée (si la date diffère)

Quantité de biens livrés ou de services rendus

  • Elle est exprimée soit en unités du bien ou du service, soit en poids, volume, ou taux horaire selon les usages de la profession

Dénomination précise des biens ou services fournis

Prix unitaire hors taxe

  • Le prix unitaire hors taxe des biens livrés ou des services rendus doit être déterminé hors rabais, remises ou ristournes consentis, lesquels doivent faire l'objet d'une mention particulière.

Le taux de TVA légalement applicable

  • Si les opérations sont soumises à des taux de TVA différents, il faut faire figurer sur chaque ligne le taux correspondant

Le montant de la TVA à payer et, par taux d’imposition, le total hors taxes et la taxe correspondante mentionnés distinctement

Rabais, remises, ristournes ou escomptes

  • Ces rabais, remises, ristournes ou escomptes doivent figurer sur chaque ligne de facture sauf lorsqu'ils ne peuvent être connus qu'en fin de facture, c'est-à-dire par exemple dans le cas de remises liées au montant global de la facture ou au mode de paiement

  • Ces réductions de prix doivent être directement liées à l’opération à laquelle elles se rapportent

  • Chaque catégorie de rabais, remises, ristournes ou escomptes, qui ne peut être rattachée à des opérations particulières, mais liée à l'ensemble des opérations facturées doit être mentionnée distinctement sur la facture

En cas d'exonération, la référence à la disposition pertinente du code général des impôts ou à la disposition correspondante de la directive TVA ou à toute autre mention indiquant que l'opération bénéficie d'une mesure d'exonération

  • Pour les livraisons intra-communautaires de biens, la mention pourra être "Exonération - Article 262 ter I du code général des impôts"

Lorsque l’acquéreur ou le preneur est redevable de la taxe, la mention « autoliquidation »

A titre d'exemples, cette mention est à porter sur les factures lorsque :

  • une prestatation de service est taxable au lieu d’établissement d’un client assujetti à la TVA dans un autre Etat Membre de l’Union européenne ;

  • des travaux sont effectués par un sous-traitant du BTP pour le compte d'un donneur d'ordre assujetti à la TVA, le sous-traitant ne déclare plus la TVA et c'est l'entreprise principale qui la déclare

Lorsque l’acquéreur ou le preneur émet la facture au nom et pour le compte de l’assujetti, la mention « autofacturation »

 

Stockage des factures

Factures émises

Type de factures

Durée

Modalités de conservation

Factures créées et transmises au format papier

6 ans

Forme et contenu originels (pas de dématérialisation possible) et conservation de la piste d'audit fiable

Factures créées et transmises par voie électronique

6 ans

Signature électronique qualifiée :

Forme et contenu originels de la facture

Signature électronique

Certificat électronique


EDI :

Forme et contenu originels de la facture

Le fichier des partenaires

La liste récapitulative séquentielle

Factures électoniques transmises sur support papier

6 ans

Conservation en original ou en copie qui en est la reprodution fidèle et durable /

Pour le papier : double papier selon les règles de conservations

Pour l'électronique : double électronique garantissant l'authenticité, l'intégrité et la perennité du contenu du double depuis l'émission de l'original papier

 

Factures reçues

Type de factures

Durée

Modalités de conservations

Factures au format papier

6 ans

Forme et contenu originels (pas de dématérialisation possible) et conservation de la piste d'audit fiable

Factures électroniques

6 ans

Support informatique pendant le délai de reprise

Au delà du délai de reprise, sur tout support pendant les trois années suivantes (ainsi que la piste d'audit fiable ou le certificat électronique et la signature en cas de recours à la signature électronique qualifiée ou le fichier des partenaires et la liste récapitulative séquentielle en cas de recours à l'EDI)

 

Lieu de stockage

Les factures émises ainsi que toutes les factures doivent être stockées sur le territoire français, lorsque ce stockage n'est pas effectué par voie électronique garantissant un accès immédiat, complet et en ligne aux données concernées.

Les factures doivent être stockées sous la forme originelle, papier ou électronique, sous laquelle elles ont été transmises

Les assujettis ne peuvent stocker les factures transmises par voie électronique dans un pays non lié à la France par une convention prévoyant une assistance mutuelle ou n'offrant pas un droit d'accès en ligne immédiat, de téléchargement et d'utilisation de l'ensemble des données concernées.

Sanctions applicables

En vertu des dispositions de l’article 1737 du code général des impôts, le non-respect des règles de facturation susmentionnées est sanctionné par une amende dont le montant varie en fonction de l’infraction commise.

Toute omission ou inexactitude constatée dans les factures donnent lieu à l’application d’une amende de 15 euros par mention et par facture.

Le montant total des amendes dues au titre de chaque facture ne peut toutefois pas excéder le quart du montant qui y est ou aurait dû y être mentionné (aucune pénalité n’est donc applicable pour les factures dont le montant hors taxe est inférieur à 60 euros).

 
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